La Crise Invisible et Silencieuse qui Déstabilise les Communautés Pourrait être un Sujet d’Espoir

GEORGETOWN, 29 janvier 2019 (IPS) – De nouvelles données montrent que deux milliards d’hectares de terres dans le monde, soit environ le double de la taille de la Chine, ont été dégradés. Et de cette estimation, 500 millions d’hectares sont des terres agricoles abandonnées.

La 17e session du Comité chargé de l’examen de la mise en œuvre (CRIC17) de la Convention des Nations Unies sur la lutte contre la désertification (UNCCD) s’est ouverte le lundi 28 janvier 2019 dans la capitale guyanaise, avec la publication de ces données époustouflantes relatives à la dégradation des terres et à la désertification.

« Nous savons également que chaque année, nous détruisons au totale 12 millions d’hectares de terres. Il est donc évident que toutes les terres que nous détruisons ont un potentiel de restauration », a déclaré à IPS, Monique Barbut, Secrétaire exécutive de la Convention. C’est pour cette raison que Barbut a déclaré que la dégradation des sols et la désertification constituent « un sujet d’espoir ».

La désertification est le processus par lequel une terre fertile devient désertique, généralement à la suite d’une sécheresse, de la déforestation ou d’une agriculture inappropriée.

Selon la Convention des Nations Unies sur la lutte contre la désertification, la désertification est une crise silencieuse et invisible qui déstabilise les communautés à l’échelle mondiale et il faudrait faire davantage pour la combattre, inverser la dégradation des sols et atténuer les effets de la sécheresse.

Mais contrairement à la finalité qui accompagne la perte de la biodiversité, Barbut a déclaré que les hommes avaient une seconde chance en matière de dégradation des sols et de désertification.

« Quand vous avez perdu une espèce, vous avez perdu une espèce. La terre ne fonctionne pas comme ça et peut être restaurée partout dans le monde », a-t-elle déclaré à IPS.

« Ce n’est donc pas seulement un sujet dépressif, comme beaucoup d’autres sujets touchant l’environnement. Plus vous restaurez des terres, meilleur sera le nombre de choses à venir. ”

La Secrétaire exécutive de la Convention des Nations Unies sur la lutte contre la désertification (UNCCD), Monique Barbut, a déclaré que de nouvelles données montrent que deux milliards d’hectares de terres ont été dégradés dans le monde. Mais contrairement à la finalité qui accompagne la perte de biodiversité, Mme Barbut déclarait que l’humanité avait une seconde chance en matière de dégradation des sols et de désertification. Crédit: Desmond Brown / IPS

Elle a évoqué le Plateau de Lœss de la Chine, le plus grand programme de restauration de terres dans le monde, qui peut être considéré comme un exemple de ce qui est possible.

« Ils ont restauré en une fois 400 millions d’hectares de terres et les ont transformés en un programme d’agroforesterie », a déclaré Barbut.

« Ce programme a aidé 6,7 millions de personnes à sortir de la pauvreté. Deuxièmement, nous constatons maintenant que les régimes de pluie ont changé. Là où il ne pleuvait pas auparavant, la pluie revient, il y a donc de nombreux impacts positifs dus à la restauration des terres. ”

Les nouvelles données montrent également qu’il existe un lien direct entre la restauration des terres et la réduction du nombre de personnes vivant dans la pauvreté en zones rurales.

Barbut a déclaré que les données montrent une diminution de 27% du nombre de personnes vivant dans la pauvreté dans les communautés rurales.

“C’est un signal positif”, a-t-elle déclaré, tout en notant que la pauvreté urbaine s’accentuait parallèlement.

« C’est intéressant de noter qu’au lieu d’envoyer des populations dans les villes, il est préférable de restaurer les terres, afin de s’assurer qu’elles peuvent vivre sur ces terres ».

Barbut a déclaré que les données montrent que les principales causes humaines de la dégradation des sols sont la déforestation, le surpâturage et une gestion inadéquate des sols.

Il existe également d’autres causes humaines indirectes telles que la pression démographique, le régime foncier, la mauvaise gouvernance et le manque d’éducation.

‘’Les Caraïbes ont leur propre exemple de désertification, Haïti est le désert des Caraïbes’’, déclarait un scientifique à IPS

Le Dr Richard Byron-Cox, responsable de l’alignement des programmes d’action et du renforcement des capacités à la Convention, a déclaré qu’il y a plus de 100 ans, Haïti possédait les meilleurs sols et était également le principal producteur de canne à sucre dans les Caraïbes.

« Comme vous le savez, Haïti est l’un des deux pays de l’île d’Hispaniola. Lorsque vous survolez Hispaniola, une partie est verte et l’autre est brune. Pourquoi ? En raison de la désertification, et c’est Haïti », a déclaré Byron-Cox à IPS.

‘’Ce même pays, il y a 150 ans, avait les meilleurs sols de toutes les Caraïbes. Aujourd’hui c’est un désert. La désertification n’a rien à voir avec les déserts naturels. Ainsi, lorsque vous parlez de lutte contre la désertification, cela n’inclut pas les déserts naturels, ce sont de bonnes terres qui deviennent mauvaises.”

Outre la déforestation, des inondations et des glissements de terrain dévastateurs ont laissé à nu de nombreuses régions d’Haïti qui étaient autrefois couvertes de forêts.

En 2013, World Vision Australie a mené une mission d’exploration pour examiner le potentiel de régénération naturelle des forêts par le biais de la régénération naturelle gérée par le producteur (FMNR). Cela a été inspiré par le succès d’un programme similaire en Éthiopie, mis au point dans le cadre du Mécanisme de développement propre (MDP) du Protocole de Kyoto.

Le MDP permet aux projets de reboisement d’obtenir des crédits (réductions d’émission certifiées ou CER) pour chaque tonne d’équivalent en dioxyde de carbone emprisonnée ou absorbée par la forêt.

Joseph Harmon, ministre d’État au ministère de la Présidence du Guyana, a déclaré qu’en matière d’utilisation durable des terres et d’autres ressources, le Guyana aspirait à être une réussite et un exemple pour les autres pays et parties intéressées. Crédit : Desmond Brown / IPS

Le ministre d’État du Guyana, Joseph Harmon, avait également à l’esprit la question de la désertification en accueillant les représentants de 135 pays dans la capitale pour la 17e session du CRIC.

Dans son discours d’ouverture, il a déclaré devant une salle comble du Centre de conférence Arthur Chung que, dans le cadre de la mise en œuvre de la Convention, le Guyana aspirait à être une réussite et un exemple pour les autres pays et parties.

« Même si le contexte guyanais ne peut être considéré comme extrême pour être catalogué de ‘’désertification’’, l’impact de la dégradation des sols est pris en compte lorsque nous planifions et élaborons des stratégies pour l’utilisation durable de nos ressources en terres. »

Il a ensuite expliqué à IPS que le Guyana était pleinement conscient du fait que la terre constituait un lien entre l’homme et l’environnement et qu’elle reliait les sphères économique, sociale, culturelle et géographique.

« Le Guyana est pleinement attaché à la protection et à la conservation de son patrimoine naturel, y compris ses ressources en terres. Notre bilan en matière de protection environnementale et de conservation des terres et de leurs ressources constitue un modèle mondial de bonnes pratiques », a déclaré Harmon à IPS.

« Le Guyana souscrit à la vision de la Convention, à savoir : appuyer l’élaboration et la mise en œuvre de politiques, programmes et mesures nationaux et régionaux visant à prévenir, contrôler et inverser la désertification et la dégradation des sols et à atténuer les effets de la sécheresse. »

Le Guyana a finalisé son programme de définition des objectifs de neutralisation de la dégradation des sols et son plan national harmonisé de lutte contre la dégradation des sols.

Harmon a également annoncé la mise en place du projet de développement et de gestion durables des sols, qui vise à créer un environnement favorable à la promotion du développement, de la gestion et de la remise en état durables et résilients au climat, à l’appui de la trajectoire d’État vert du Guyana.