Un long chemin à parcourir pour parvenir à l'égalité des sexes: Journée internationale de la femme

ABIDJAN, Côte d'Ivoire, 1 fév 2018 (IPS) – La Journée internationale de la femme est une invitation à célébrer les réalisations extraordinaires des femmes et à se rappeler que, dans le monde entier, nous sommes encore loin de l'égalité homme-femme.

Les femmes sont l'épine dorsale des économies africaines. Crédit: Mantoe Phakathi / IPS La Journée internationale de la femme est une invitation à célébrer les réalisations extraordinaires des femmes et à se rappeler que, dans le monde entier, nous sommes encore loin de l'égalité homme-femme.

Aujourd'hui en Afrique, les femmes accusent du retard par rapport aux hommes sur les plans politique, social et économique, bien qu'elles représentent la moitié de la population du continent. J'ai toujours dit qu'un oiseau ne peut voler qu'avec deux ailes. Depuis trop longtemps, une Afrique dominée par les hommes nous fait penser à l’expression proverbiale d’un oiseau qui ne bat que d'une aile. La croissance et l'épanouissement de l'Afrique ne se feront qu'avec la participation active et égale des femmes.

Les signes de progrès sont nombreux et encourageants. Ellen Johnson Sirleaf du Liberia, par exemple, a accompli un travail remarquable en tant que première femme élue chef d'État en Afrique. Elle mérite d’être félicitée pour le rôle crucial qu'elle a joué durant la transition de son pays pour sortir du conflit, et pour son comportement exemplaire lors de la transmission pacifique du pouvoir à son successeur George Weah, vainqueur des élections présidentielles de 2017. Elle mérite également d’être félicitée pour avoir été la première femme à remporter le Prix Ibrahim du leadership africain. Comme Mo Ibrahim l'a dit lui-même, le prix a envoyé un « message fort à toutes les femmes et filles d’Afrique leur disant qu'elles pouvaient aider à changer le continent ».

Et c'est exactement ce que les femmes commencent à faire. En politique, le nombre de femmes élues aux parlements africains a connu une forte progression. De 2005 à 2015, on a constaté, dans 85 % des pays africains, une représentation accrue des femmes au parlement. Que cela se fasse à petits pas ou à grands pas, la société sera toujours gagnante, s’il y a plus de femmes au gouvernement ou au parlement généralement dominé par les hommes pour équilibrer les débats et prises de décisions.

Les femmes sont l'épine dorsale des économies africaines. Elles sont les principales productrices et transformatrices de produits alimentaires dans l'agriculture et l'économie rurale de l'Afrique. Plus de la moitié des femmes actives du continent gagnent leur vie dans l'agriculture, et détiennent la majorité des petites et moyennes entreprises. Malgré cela, elles possèdent à peine 15 % des droits d'utilisation des terres et seulement 1 % de la propriété foncière. Elles ne bénéficient que de 5 % des services de vulgarisation agricole et de moins de 10 % des crédits disponibles.

Cette situation ne peut et ne doit perdurer. Pour des raisons de droits de l'homme, de justice et d'équité ainsi que de bon sens financier, la Banque africaine de développement milite en faveur de politiques qui encouragent les femmes à travailler, créer des entreprises et participer au développement du marché en tant que consommatrices, productrices et entrepreneures. Un potentiel économique important est inexploité, lorsque les femmes sont privées de telles possibilités.

Nous avons récemment commandé une étude afin d'identifier le potentiel inexploité sur le marché des femmes. Les résultats ont été surprenants : un écart estimé à 42 milliards de dollars entre l'accès des hommes et celui des femmes au financement, à tous les niveaux de la chaîne de valeur des entreprises. Le déficit de financement pour les femmes dans le secteur agricole à lui seul se chiffre à 15,6 milliards de dollars! Si les agricultrices disposent du même accès aux ressources productives que les hommes, elles pourraient augmenter les rendements de leurs exploitations de 20 à 30 %, ce qui permettrait d'affranchir 100 à 150 millions de personnes de la faim. La réduction de l'écart entre hommes et femmes pourrait également contribuer à accroître la sécurité alimentaire et améliorer les moyens de subsistance de la population croissante de l'Afrique.

L'égalité homme-femme est un élément clé de notre stratégie des High 5, un domaine d'intervention essentiel pour les opérations et les politiques de la Banque, et une condition préalable à la réalisation de ses objectifs de développement. Dans notre culture et notre structure organisationnelles, nous intégrons le genre dans toutes nos opérations. Nous continuons également à soutenir les réformes en faveur de l'égalité homme-femme dans nos pays membres africains. Il est important de noter qu'un système de marqueurs de genre est en cours d'introduction et que des spécialistes du genre ont été déployés dans les régions d’intervention de la Banque.

La Banque africaine de développement intensifie également la production de profils de genre par pays, et développe un portail en ligne sur le genre pour obtenir, diffuser et échanger des données sur les indicateurs de genre. La Banque lancera également le premier indice de genre pour l'Afrique en 2018, le premier tableau de bord prospectif sur l'égalité homme-femme en Afrique, et accueillera le sommet des Banques multilatérales de développement sur le genre en 2018. Les investissements de notre Banque visent à soutenir les femmes et à les aider à sortir de la pauvreté. Nous avons élaboré l’Action positive pour le financement en faveur des femmes en Afrique (AFAWA), dont l’objectif est de mobiliser 300 millions de dollars durant la première phase du programme, et de lever des ressources à hauteur de 3 milliards de dollars pour des services financiers et non financiers destinés aux femmes entrepreneurs d'ici à 2025. La Banque africaine de développement publiera également des notations bancaires de l'AFAWA basées sur la qualité des prêts accordés aux femmes, et encouragera les bonnes pratiques en matière de prêt.

Le chemin à parcourir est encore long et il reste beaucoup à faire. Le changement devra passer par un processus de collaboration dans toutes les sphères de la société. Chacune de ces mesures stratégiques contribuera à réaliser la parité avec les hommes et à sortir des millions de femmes de la pauvreté et les mener vers la prospérité. En dernier ressort, si elles sont soutenues, les femmes produisent des résultats. Quand elles gagnent, l'Afrique gagne. Et c'est ce que nous devons cultiver et célébrer, pas seulement une fois par an, mais tous les jours.