DEVELOPPEMENT-AFRIQUE DU SUD: Des jeunes au service de la jeunesse

JOHANNESBURG, 8 déc (IPS) – Ils ont passé l'année dernière à affronter directement nombre des problèmes de l'Afrique du Sud, depuis la forte incidence de viol jusqu'au fait que plusieurs enfants luttent contre la faim. Ils n'espéraient rien de moins.

Ce sont les jeunes hommes et jeunes femmes du premier groupe de 'City Year South Africa service leaders' : un groupe de jeunes volontaires qui ont travaillé sur divers projets à Johannesburg, la capitale économique d'Afrique du Sud, en 2005.

L'initiative de la City Year est basée sur un programme américain lancé en 1988 par deux étudiants de l'Université de Harvard, Michael Brown et Alan Khazei, dans la ville orientale de Boston. Les deux camarades d'amphi de la faculté de droit croyaient que les jeunes pouvaient être une force puissante pour s'attaquer aux maux sociaux si on leur donne un forum approprié pour le faire — et qu'ils allaient également acquérir des connaissances utiles ce faisant.

Les 50 premiers volontaires de City Year aux Etats-Unis ont passé l'été 1988 à travailler avec des personnes handicapées, des personnes âgées — et à apporter leur aide dans des projets environnementaux et immobiliers à Boston. Aujourd'hui, il y a environ 1.000 volontaires déployés dans des villes à travers le pays.

La version sud-africaine du programme a commencé cette année avec 109 volontaires âgés de 18 à 25 ans, plusieurs ayant pris du temps de leurs études pour y prendre part. Les volontaires étaient divisés en groupes de 10, envoyés ensuite dans des écoles et un centre communautaire à Johannesburg.

Même s'ils ont été sélectionnés en grande partie sur la base d'expérience préalable dans le bénévolat, plusieurs disent que rien ne pouvait les avoir préparés pour leur City Year. Le travail était aussi bien fatigant que stimulant, a noté Aletta Smith, âgée de 19 ans, élue leader du meilleur service de l'année par ses pairs pendant une cérémonie de remise de diplômes aux volontaires.

Quelques-uns des plus grands défis, a-t-elle dit, étaient apparus lorsqu'elle essayait de travailler en équipe avec des gens de différents milieux — et confrontée à des situations où elle sentait qu'elle ne pouvait rien faire pour aider les gens : "Comme le cas de la petite fille victime d'un viol". Toutefois, "City Year est structurée d'une manière qui nous aide à traiter de ces genres de situations, à un niveau personnel et en essayant d'aider les enfants avec lesquels nous travaillons", a-t-elle ajouté.

"Nous avons recours aux dirigeants de notre équipe pour des conseils, et s'ils ne peuvent pas nous aider, nous pouvons compter sur d'autres structures au sein de City Year, où des sessions pour les conseillers, les conducteurs, la formation et les comptes-rendus de missions sont prévus pour que nous puissions venir à bout des situations auxquelles nous sommes confrontés".

Nishe Naidoo, 19 ans, a également parlé des stéréotypes qu'elle a eu à surmonter lorsqu'elle a affaire à des volontaires d'autres milieux socioculturel — et de la manière dont les gens qu'ils essayaient d'aider pouvaient parfois être peu coopératifs.

"Il y avait des moments où je voulais abandonner, un millier de fois même, comme lorsqu'on doit s'occuper d'un enfant difficile ou de quelqu'un qui vous prend maladroitement, de sorte que vous vous rebiffiez, a-t-elle déclaré. "Mais la motivation des amis et le système mis en place par City Year pour nous guider et nous donner des conseils nous ont permis de tenir bon".

L'une des principales manières dont les volontaires de City Year ont assisté les communautés était à travers l'appui aux programmes extrascolaires, où des enfants de communautés pauvres recevaient des cours supplémentaires en mathématiques et dans d'autres matières. Les volontaires aidaient également les enfants dans leurs devoirs de maison et diverses activités de formation continue.

"Avant qu'ils ne viennent, nous n'avions aucun programme extrascolaire. En fait, après 14 heures, les enseignants voulaient simplement que les enfants s'en aillent parce qu'ils étaient si stressés — faisant office en même temps d'enseignants, de travailleurs sociaux, de psychologues et, dans une certaine mesure, de parents", a indiqué Olga da Silva, maîtresse à l'Ecole primaire Goudpark où 16 enseignants s'occupent de 650 élèves.

"A la fin de la journée, c'était simplement trop pour eux".

Goudpark ("Gold Park" – Parc doré) est situé dans Eldorado Parc, une région habitée principalement par des Sud-Africains métis – un héritage de la ségrégation de la période d'apartheid. Le chômage est répandu, comme l'activité des gangs. Dans ce contexte, les activités extrascolaires jouent un rôle crucial pour maintenir les enfants hors des rues, et en dehors des gangs.

Les volontaires à Goudpark ont également initié un projet d'alimentation dans les écoles, après qu'ils ont compris que la faim rendait inattentifs les enfants qui suivent des activités extrascolaires. Ils ont persuadé des magasins locaux de faire don de nourriture, quelque chose qui a amené des femmes de la communauté à se proposer pour préparer des repas qui nourrissent jusqu'à 100 enfants par jour. City Year Afrique du Sud est affiliée au 'National Youth Service' (Service national pour la jeunesse), créé par la présidence sud-africaine pour promouvoir le service des jeunes dans le pays. Elle est gérée comme une organisation non gouvernementale, et financée par des entreprises, des fondations caritatives, des individus et le gouvernement.

Bien que les volontaires ne reçoivent pas de salaires, on leur octroie une allocation mensuelle d'environ 95 dollars, et de l'argent pour le transport. Après une année de service, ils reçoivent également des bourses d'études d'un peu moins de 950 dollars pour payer la scolarité (pour ceux qui envisagent de reprendre leurs études), ou pour l'utiliser comme un capital de départ pour démarrer une affaire.

Trente-huit membres de la première vague de volontaires se sont inscrits pour une autre année de service, et travailleront comme leaders de groupe pour les 170 nouvelles recrues qui devraient rejoindre la City Year en 2006. Pour le moment, le programme est seulement opérationnel à Johannesburg, bien qu'on projette de l'étendre à d'autres villes dans le pays.

Cette année, les volontaires — remarquables dans leurs vestes rouge-vif et des pantalons kaki — ont aidé plus de 2.000 enfants.

Toutefois, Teboho Mahuma, directeur exécutif de City Year Afrique du Sud, dit que l'initiative est très modeste dans ses intentions : "Nous n'imaginons pas avoir une réponse à chaque besoin de la société".

Les bénéfices sont ailleurs.

"Cela a élargi l'idée que j'avais de la société sud-africaine. Vous entendez des choses et vous ne croyez pas réellement que ce soit vrai, mais être ici sur le terrain et travailler avec des enfants chaque jour a ouvert mes yeux sur les réalités de notre pays", a déclaré Letitia Jackson, 19 ans.