AFRIQUE: Les aflatoxines minent la santé et le commerce dans la partie subsaharienne

BULAWAYO, Zimbabwe, 20 déc (IPS) – La contamination par l'aflatoxine est une menace croissante pour le commerce, la sécurité alimentaire et la santé en Afrique subsaharienne, où les petits fermiers font face au défi de la production alimentaire et maintenant le changement climatique, selon des chercheurs.

Les aflatoxines sont des poisons toxiques et cancérigènes produits par certains champignons de moisissure verte qui se produit naturellement dans le sol. Ces poisons sont devenus un contaminant grave des aliments de base en Afrique subsaharienne, dont le maïs, le manioc, le sorgho, l'igname, le riz, l'arachide et les noix de cajou.

L'Institut international d'agriculture tropicale (IITA), une organisation à but non lucratif pour l'international basée au Nigeria, a dirigé des recherches de pointe dans la réduction de la contamination par les mycotoxines en Afrique par le déploiement d'approches novatrices.

Selon les chercheurs de l'IITA, l'exposition aux mycotoxines est un obstacle important à l'amélioration de la santé et du bien-être des populations en Afrique, où des niveaux élevés de contamination par les aflatoxines ont été confirmés. Beaucoup de petits agriculteurs ne parviennent pas à éviter la contamination pendant la production et le stockage de leurs cultures parce qu'ils manquent de moyens rentables pour déterminer les poisons.

L'Afrique subsaharienne perd chaque année plus de 450 millions de dollars de recettes du commerce des principaux aliments de base, notamment le maïs, l'arachide du fait de la contamination par les aflatoxines, on,t indiqué les chercheurs à IPS. La facture pour la santé à cause du fait que les gens mangent des aliments contaminés sans le savoir se chiffre en des millions de dollars dans une région ayant des centres de santé surchargés.

L'Afrique est exposée à des toxines qui sont liées à la suppression de l'immunité, au cancer du foie chez l'Homme et au retard de croissance chez les enfants. Selon l'UNICEF, 40 pour cent des enfants en Afrique subsaharienne sont rabougris ou ont une faible taille pour leur âge qui peut être associé au développement du cerveau avec des facultés affaiblies.

Les chercheurs disent que des températures élevées et la sécheresse favorisent la croissance desd champignons, tandis que de mauvaises pratiques agricoles et l'état de l'insécurité alimentaire de nombreuses personnes en Afrique subsaharienne augmentent leur exposition à la contamination par l'aflatoxine. En plus, une forte teneur du sol en eau à la récolte attribuée aux pluies hors-saison du fait de la variabilité climatique augmente la contamination.

“Le changement climatique est en effet prévu pour avoir un impact profond sur la contamination des cultures vivrières et fourragères par l'aflatoxine”, a déclaré Joao, ajoutant que, “En conséquence, il prévu que toute réduction du niveau de précipitation ou toute augmentation de la température accentuera le problème des aflatoxines”.

En 2009, l'IITA, la Fondation de technologie agricole africaine (AATF), le département amériocain de l'Agriculture -le Service de recherches agricole (USDA-ARS) et d'autres partenaires ont développé une technologie de contrôle biologique indigène, baptisée AflaSafe pour atténuer la contamination par l'aflatoxine dans le maïs et l'arachide.

Aflasafe est un mélange de quatre souches non productrices d'aflatoxine du champignon de moisissure verte (Aspergilllus flavus) d'origine indigène. Le produit Aflasafe formulé est ensuite répandu dans le champ où il se déverloppe et empêche les souches produisant de toxines de coloniser, de se multiplier et de contaminer les cultures.

Une recherche ciblée du contrôle biologique de l'aflatoxine en Afrique a commencé pour la première fois au Nigeria où Aflasafe est aujourd'hui un produit commercial entièrement enregistré. Des produits spécifiques aux pays ont été développés et introduits au Kenya, au Burkina Faso, au Sénégal, en Gambie et en Zambie.

Dans tous ces six pays où les produits de contrôle biologique sont testés de 2008 à ce jour, l'IITA a dit que les agriculteurs ont toujours atteint jusqu'à 99 pour cent de réduction de la contamination par les aflatoxines en utilisant Aflasafe dans les champs de maïs et de l'arachide.

“Les avantages attribués à l'utilisation du produit de contrôle biologique Aflasafe pour atténuer la contamination par l'aflatoxine dépassent de loin son coût”, a affirmé Juliette Akello, phytopathologiste et membre de l'équipe de l'IITA en Zambie dans le cadre de 'Aflatoxin Biocontrol' (Biocontrôle de l'aflatoxine). “L'exposition à l'aflatoxine par la consommation d'aliments contaminés est une combinaison de l'ignorance, de la pauvreté et de la mauvaise application des normes par les gouvernements”.

Globalement, les aflatoxines constituent une menace connue qui a été réduite grâce à l'investissement dans les contrôles de la sécurité des aliments. Les petits fermiers en Afrique dépendent d'une combinaison de méthodes traditionnelles de stockage et de l'utilisation de pesticides pour éviter les charançons. Cependant, ces méthodes ne s'avèrent pas toujours efficaces contres les pestes, les amenant à perdre une grande partie de la récolte stockée au moment où ils en ont le plus besoin.

D'autres approches innovantes sont en essai en Afrique pour réduire les pertes avant et après les récoltes et éliminer la contamination par les aflatoxines au moyen de l'Aflasafe.

Au Zimbabwe, les chercheurs de l'Université du Zimbabwe et de l'ONG 'Action Contre la Faim' travaillent avec les communautés dans deux districts afin de déterminer si l'amélioration du stockage peut réduire la contamination par les aflatoxines dans le grain de maïs local. cette recherche de deux ans, soutenue par le programme 'Cultivate Africa’s Future (CultiAF)', une initiative financée par le Centre canadien de recherche sur le développement international (CRDI) et le Centre australien pour la recherche agricole internationale, évaluera également les niveaux d'exposition des femmes et des nourrissons. Le projet a introduit des silos métalliques et du plastique épais “supers sacs,” permettant au maïs d'être stocké dans des conditions hermétiques.

Les agriculteurs en Afrique sub-saharienne font face au défi du manque d'équipement de séchage, la plupart producteurs de maïs et d'arachide gardant leurs cultures dans les champs pour qu'elles sèchent avant de les récolter. Parfois, ils les stockent avant qu'elles ne s'assèchent correctement, les rendant vulnérables à l'attaque des aflatoxines.

Les exportations de produits agricoles notamment les arachides en provenance d'Afrique ont diminué de près de 20 pour cent au cours des deux dernières décennies. Ces produits ont été rejetés pour n'avoir répondu aux réglementations du marché de l'Union européenne sur les niveaux d'aflatoxines dans les aliments destinés à la consommation humaine, un obstacle sérieux pour le commerce international.

Selon l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture, seuls 15 pays africains avaient des limites réglementaires pour les aflatoxines en 2013.

En Zambie, par exemple, il a été déclaré que près de 100 pour cent des marques de beurre d'arachide échantillonnées entre 2012 et 2014 provenant des supermarchés et marchés locaux contenaient des niveaux dangereux d'aflatoxines au delà de 20ppb. Moins de 30 pour cent de farine d'arachide moulue collecté des marchés et des fermes avaient des niveaux compris dans les limites de 4 ppb fixées par l'UE comme étant des limites sûres.

Alors qu'au Kenya, considéré comme prmier point chaud d'afflatoxines en Afrique de l'est, près de 200 personnes sont mortes à cause de l'aflatoxicose aiguë après avoir mangé du maïs contaminé par les aflatoxines entre 2004 et 2006. Environ deux millions de sacs de maïs ont été déclarés impropres à la consommation humaine à cause des niveaux élevés d'aflatoxines en 2010.

Le chargé de programmes de l'IITA pour Aflasafe au Malawi, Dr Joseph Atehnkeng, a dit qu'entre 40 et 100 pour cent des produits à base d'arachide au Malawi, ont été déclarés comme contenant des niveaux de toxines dangereuses.

Les anciens grands exportateurs d'arachide: le Mozambique, le Sénégal, la Gambie, la Zambie et le Malawi, ont perdu des marchés lucratifs dans l'UE, aux Etats-Unis et en Afrique du Sud à cause des niveaux élevés d'aflatoxine dans leurs produits, souligne le scientifique et phytopathologiste de l'IITA, Dr Joao Augusto.

Le Mozambique a depuis la fin des années 70 enregistré une forte prévalence du cancer du foie dans la partie sud du pays qui a été associée à la consommation d'aliments contaminés par l'aflatoxine, en particulier les arachides.

Selon le Partenariat pour le contrôle des aflatoxines (PACA), un projet régional créé en 2009 pour réduire et finalement éradiquer les aflatoxines par des stratégies prouvées et novatrices, il faut des politiques efficaces de régulation des aflatoxines et des normes spécifiques à chaque pays.

Chercheur, Chapwa Kasoma de la Zambie, pévient que laissée non incontrôlée, la contamination par les aflatoxines pourrait retarder le développement en Afrique subsaharienne.

“Si nous voulons vaincre la pauvreté sous toutes ses formes, combatttre non seulement l'inadapatation des aliments, mais aussi maîtriser également toutes les formes de malnutrition, nous devons être préoccupés”, a déclaré Chapwa à IPS, également un superviseur de terrain chez Pioneer DuPont. “Etant de puissants cancérigènes, les aflatoxines sont clairement un problème de nutrition”.