TOGO: «La terre ne trompe jamais», selon un jeune agriculteur

LOME, 11 avr (IPS) – «On dit souvent chez nous que la terre ne trompe jamais et je me rends compte de cela depuis que je me suis mis à l’agriculture», a déclaré à IPS, Awuissa Walla, un jeune agriculteur de 40 ans environ, installé dans le nord-ouest du Togo, en Afrique de l’ouest.

Walla s’est mis à l’agriculture il y a une dizaine d’années, après son diplôme d’ingénieur agronome. Il affirme que des amis l’ont aidé financièrement par des prêts pour acquérir une terre de 18 hectares à Badja, une localité située à 50 kilomètres de Lomé, la capitale togolaise. Aujourd’hui, il vit de son travail agricole et ne regrette pas son choix. «J’essaie d’exploiter au mieux l’espace avec une diversité de produits», explique Walla dont le champ renferme des fruits, notamment l’orange, le citron, la mandarine, la banane et l’ananas. Une partie de l’espace est consacrée aux palmiers, aux cocotiers, aux tecks et à la culture de l’igname, mais le maïs reste sa principale production. «Je cultive du maïs sur huit hectares et je récolte habituellement quatre tonnes par saison, environ 40 sacs de maïs», indique-t-il. Il vend chaque sac au moins à 15.000 francs CFA (environ 32 dollars), ce qui lui fait au total quelque 1.280 dollars de revenu par saison. Il fait deux saisons de maïs par an, dont chacune dure trois mois. Walla a engagé des métayers qui utilisent des méthodes modernes pour accroître la production, notamment un tracteur. Il fait aussi de la culture arrosée ou irriguée selon la nature des plantes, grâce à d’un dispositif technique alimenté par un forage. Walla profite, en fait, d’un programme mis en place par le gouvernement togolais pour approvisionner les agriculteurs en engrais. Pour lui, une bonne gestion de l’eau par l’irrigation ainsi que la politique agricole du gouvernement lui permettent d’avoir une bonne récolte comme la plupart des agriculteurs togolais.

Le Togo a mis en œuvre une stratégie de relance de son agriculture avec un Programme national d'investissement agricole et de sécurité alimentaire (PNIASA), estimé à environ 617 milliards de FCFA (environ 1,3 milliard de dollars).

Les trois dernières campagnes agricoles ont été marquées successivement au Togo par des excédents céréaliers, notamment le maïs et le sorgho: environ 31.000 tonnes en 2009, 95.000 tonnes en 2010 et 110.000 tonnes en 2011.

Le surplus de la production a été vendu par le biais de l’Agence nationale pour la sécurité alimentaire (ANSAT) au Programmes alimentaire mondiale (PAM) au profit d’autres pays africains. Le PAM et l’ANSAT ont signé, le 7 avril, un nouveau contrat aux termes duquel le Togo livrera 10.300 tonnes de maïs au Niger, d’un montant de 2,3 milliards FCFA (environ 4,8 millions de dollars) qui seront directement reversés aux producteurs.

Quelque 6.000 tonnes seront prochainement vendues au Ghana toujours par l’intermédiaire du PAM. Au début de cette année, le PAM a acheté auprès de l’ANSAT près de 8.000 tonnes de maïs, contre environ 6.000 tonnes l’année dernière.

Le gouvernement togolais envisage de transformer l'agriculture de subsistance en une véritable économie de marché, affirmant qu’une importance sera accordée à la filière «semencière». Dans le cadre du PNIASA, il est mis à la disposition des agriculteurs au moins 30.000 tonnes d'engrais chaque année à un prix fortement subventionné.

Ces engrais sont vendus aux paysans à 10.000 FCFA (environ 21 dollars), au lieu de 15.000 FCFA (32 dollars) «Le gouvernement nous a aidés en nous donnant des engrais et des semences, cela nous a permis d’avoir une bonne récolte», reconnaît Donné Amémadon, un paysan de Tsévié, au nord de Lomé. «Les engrais qui ont été distribués nous permettent d’augmenter nos productions», renchérit Benoît Koffi Kové, un autre d’Alokoégbé (nord-ouest).

En plus des avantages de la politique agricole du pays, les agriculteurs tirent aussi profit de la clémence de la nature.

«Le Togo, notre pays, bénéficie encore d'une assez bonne pluviométrie qui, associée à une bonne politique agricole, assure à nos populations la sécurité alimentaire», affirme Zackari Nandja, le ministre de l’Eau. Si l'agriculture doit rester le moteur du développement, alors il importe de repenser la gestion de l’eau, dit-il.

«Il faut que des conseils techniques appropriés soient donnés aux agriculteurs à tous les niveaux, surtout pour gérer l’eau», souligne également Koudjo Kligbé, un technicien agricole. «Il faut qu’on parte de la connaissance du producteur, qu’on parte de ses pratiques, qu’on essaie de voir ce qu’on peut lui apporter de nouveau», ajoute-t-il à IPS. Selon les données officielles, le secteur agricole occupe 70 pour cent de la population du Togo et représente 40 pour cent de son produit intérieur brut. Environ 10 pour cent du budget national est consacré à ce secteur. Le pays compte quelque six millions d’habitants selon le recensement de 2011. «Nous avons initié plusieurs projets dont le Programme d’appui au développement agricole au Togo (PADAT) qui permet d’appuyer les petits producteurs, avec des aménagements de terrain, mais aussi la construction de magasins pour le stockage des produits», explique Messan Kossi Ewovor, ministre de l’Agriculture. Il encourage les paysans à mieux s’organiser en groupements «pour être représentés dans les instances de décisions des activités qui les concernent». Le Fonds international de développement agricole (FIDA) soutient financièrement le Togo dans le cadre du PADAT avec une enveloppe de 13,5 millions de dollars.