TRINIDAD: Les prévisions aujourd’hui, c’est l’agriculture résistante au climat

PORT OF SPAIN, Trinidad, 12 déc (IPS) – Alors même que les phénomènes météorologiques extrêmes perturbent les fermiers des Caraïbes, Ramgopaul Roop a transformé sa ferme de fruits de trois hectares en une vitrine pour la façon de lutter contre le changement climatique.

Ses méthodes agricoles de préservation comprennent la récolte de l'eau et la culture de l’herbe cymbopognon comme paillis. Puisque cette plante est aussi une mauvaise herbe, elle décourage la croissance d’autres mauvaises herbes nuisibles sans l'utilisation d'herbicides.

“Grâce au système qui utilise le cymbopognon et des arbres de pomme Cythère qui poussent plus bas que les tilleuls, ma terre est couverte de végétation, de sorte que nous puissions nous adapter aux changements climatiques”, a déclaré Roop à IPS.

“S’il fait chaud, nous avons ce paillis naturel sous la culture. S'il pleut, il aide à réduire l'érosion du sol”, a-t-il expliqué.

Roop est maintenant l'administrateur régional de l'Association des agro-entrepreneurs des Caraïbes, une organisation mandatée par les 15 membres du groupe régional CARICOM pour travailler avec les groupes régionaux d'agriculteurs à trouver des opportunités de transformation des produits agricoles.

La CABA fonctionne comme une voix collective pour les fermiers de la région à travers le plaidoyer et l'assistance dans les négociations commerciales.

Roop, qui pratique l'agriculture à la Trinidad depuis 25 ans, a affirmé que la conformité avec les réglementations environnementales d'un pays constitue la clé de la réussite. Cela s'est avéré vrai dans le cas de sa propre propriété, 'Rocrops Agrotech', qui est utilisée comme un modèle de ferme par l'Autorité de gestion environnementale de Trinidad-et-Tobago.

Ses stratégies ont permis à Rocrops de fournir aux agro-industriels 10.000 à 12.000 tilleuls chaque semaine au cours des cinq dernières années.

“Si les agriculteurs adoptaient les méthodes que j'ai mises en place, ils seraient en mesure de développer de petites fermes pour produire tout au long de l'année afin d’augmenter leur niveau de production de sorte qu'ils puissent honorer leurs engagements à l’égard des installations de traitement”, a-t-il souligné.

“Les petites fermes peuvent être transformées en une unité durable qui peut être transmise à la génération prochaine”, a ajouté Roop.

A travers la région, les agriculteurs des Caraïbes recherchent des données climatiques fiables pour les aider à prendre de meilleures décisions au cours de la planification de leurs cultures. Pour répondre à cette demande, l'Union européenne et le groupe de l'Afrique, des Caraïbes et du Pacifique (ACP) sont en train de former des météorologues pour qu’ils interagissent directement avec les fermiers pour fournir des informations fiables et opportunes sur les conditions météorologiques.

Des bulletins agricoles mensuels ou trimestriels discutent également des effets possibles que la météo prévue par les agro-météorologues aura sur l'agriculture.

La Jamaïque a également lancé un site web destiné à fournir des prévisions météo deux fois par jour aux agriculteurs. Les fermiers peuvent entrer le nom de leur localité pour des informations détaillées sur la température, l'humidité, la vitesse du vent et d'autres données pertinentes.

La formation des agro-météorologues et la publication des bulletins font partie d'un projet plus vaste de l'UE-ACP appelé l'Initiative agro- météorologique des Caraïbes (CAMI), dont l'objectif est d'améliorer la productivité agricole dans la région à travers “l’amélioration de la diffusion et de l'application des informations sur la météo et le climat en utilisant une approche intégrée et coordonnée”.

Les partenaires de la CAMI incluent, entre autres, l'Institut des Caraïbes pour la Météorologie et l'hydrologie et l'Institut de recherches agricoles et de développement des Caraïbes (CARDI).

Dr Leslie Simpson a déclaré que les agriculteurs des Caraïbes ont été dans le besoin terrible de “l’accès aux informations sur ce qui se passe et ce qui devrait arriver concernant les changements climatiques, et ensuite aux informations sur la façon dont ils peuvent faire face à ces changements et aux risques”.

Les fermiers participant aux ateliers co-parrainés par le CARDI “posaient toujours les questions: 'Quand allons-nous planter? Quand la pluie va-t- elle commencer?'”, a indiqué Dr Simpson, qui est la spécialiste de la gestion des ressources naturelles chargée des changements climatiques au CARDI.

L'augmentation de la variabilité du climat de la région et les effets des changements climatiques font qu'il est difficile pour les fermiers de déterminer le meilleur moment pour planter leurs cultures, puisque le type de culture plantée à un moment donné de l'année dépend de la quantité de pluie prévue.

Des discussions à l'échelle régionale avec les agriculteurs ont révélé que les besoins prioritaires étaient pour des prévisions climatiques saisonnières et entre les années, la prévision pour la fréquence des maladies des cultures et des insectes nuisibles, et des informations climatiques et météorologiques favorables à l’utilisateur.

Dr Simpson a déclaré que “faire face à la variabilité de la situation météorologique actuelle constitue la première étape [pour les fermiers] dans la lutte contre tout changement climatique futur”.

La CAMI note que “les prévisions à court terme sont normalement disponibles un jour d'avance, mais les pratiques agricoles modernes…exigent des prévisions météorologiques avec un délai de préparation plus grand qui permettent aux agriculteurs de prendre des mesures d'amélioration”.

“Ainsi, pour le secteur agricole, des prévisions météorologiques spécifiques aux localités dans la période moyenne (de trois à 10 jours d'avance) sont très importantes. Ces prévisions et avis doivent être publiés dans une langue que les agriculteurs peuvent comprendre”.

Un deuxième projet CARDI actuellement en cours pour aider les agriculteurs des Caraïbes à faire face aux changements climatiques est en train d’être sponsorisé par le Fonds européen de développement et géré par le groupe ACP. Ce projet vise à aider à identifier les variétés de cultures qui résisteraient à la variabilité du climat et aux changements climatiques.