SANTE-AFRIQUE DU SUD: A part les ARV, garder les mamans en vie est lemeilleur médicament

DURBAN, 14 juil (IPS) – On est tenté de la qualifier de "pas géniale" : l'idée qui essaie d'empêcher la transmission du VIH des mères aux enfants, devrait être accompagnée par des initiatives pour garder ces mères en vie après leur accouchement.

Malgré tout, les efforts en Afrique du Sud pour accorder la priorité à la santé des mères séropositives ne sont pas allés loin ces dernières années – bien qu'il y ait des signes que le gouvernement commence peut être par accorder au problème l'attention qu'il mérite. Selon 'l'Etude nationale sur la séroprévalence du VIH et de la syphilis en Afrique du Sud en 2003' (menée par le ministère de la Santé, et publiée en septembre de l'année dernière), 27,9 pour cent de femmes enceintes dans le pays étaient infectées par le virus du SIDA en 2003.

Le fait que près d'un tiers des nouveau-nés sud-africains risquent de perdre leurs mères pour cause de maladies liées au SIDA est quelque chose qui fait réfléchir — en particulier à la lumière des recherches sur les conséquences que le décès des mères peut avoir sur les enfants.

La mortalité infantile parmi des enfants séronégatifs âgés de deux ans dont les mères sont sérieusement malades ou sont mortes semble être aussi élevé que la mortalité parmi des enfants séropositifs du même âge, affirme le Dr Tshidi Sebitloane du département d'obstétrique et de gynécologie à l'Université du KwaZulu-Natal, située dans la province du même nom, dans le sud-est.

Toutefois, l'attention s'est jusqu'ici focalisée sur comment prévenir la transmission du virus de la mère à l'enfant, plutôt que sur la santé future des mères séropositives.

En partie, ceci peut être une expression du fait que le traitement anti-rétroviral (ARV) gratuit à travers le système public de santé n'a été disponible en Afrique du Sud que pendant les 18 derniers mois. Avant que le gouvernement ne commence par fournir les médicaments, les professionnels de la santé étaient obligés d'utiliser des programmes ARV financés par le privé lorsqu'ils recherchaient de l'aide pour les mères séropositives — une option trop coûteuse pour beaucoup. Mais, même après l'avènement des ARV gratuits, des mécanismes pour améliorer l'accès de ces femmes aux médicaments doivent encore être mis en place. Ces directives sont "toujours en train d'être finalisées", on l'espère dans les deux mois à venir, a déclaré Nomonde Xundu, directrice exécutive du VIH/SIDA, de la tuberculose et des infections sexuellement transmissibles au ministère de la Santé.

Actuellement, les mères séropositives doivent être orientées vers un site ARV du gouvernement pour recevoir le traitement, a-t-elle ajouté.

L'un des principaux obstacles pour donner aux jeunes accouchées un accès rapide aux médicaments est lié au fait que les tests de décompte de CD4, qui quantifient le nombre de globules sanguins assurant l'immunité, ne sont pas généralement disponibles dans les services de consultation prénatale en Afrique du Sud.

En conséquence, le rythme auquel le SIDA progresse dans l'organisme d'une jeune mère accouchée tend à rester inconnu jusqu'au moment où elle se rend dans un site ARV — à ce moment, la femme peut être très malade, et incapable de donner à son bébé l'attention qu'il ou elle requiert. Sebitloane croit que le ministère de la Santé doit faire en sorte que les conseils et les tests de dépistage volontaire pour le VIH ainsi que les tests de décompte de CD4 soient disponibles dans tous les services de consultation prénatale du pays. Ceci permettrait de prendre systématiquement les taux de CD4 lorsque des femmes enceintes se révèlent séropositives — et ouvrirait la voie à la fourniture immédiate des ARV là où c'est nécessaire.

Selon Hoosen Coovadia, un professeur chercheur sur le VIH/SIDA à l'Université du KwaZulu-Natal, entre 10 et 15 pour cent des femmes enceintes, qui se rendent dans les centres de consultation prénatale en Afrique du Sud, ont un taux de CD4 inférieur à 200 – qui les qualifie pour recevoir un traitement ARV.

Mais, en ce moment même, peu de centres de santé encouragent les femmes enceintes ou d'autres malades à s'inscrire pour le traitement ARV, affirme Sebitloane, parce que "les ARV ne sont pas largement disponibles, à cause du retard dans l'introduction (des ARV par le gouvernement)".

Les efforts pour fournir les médicaments anti-SIDA à tous ceux qui en ont besoin sont entravés par divers facteurs, qui vont des pénuries des ARV jusqu'à l'insuffisance d'équipement pour mesurer les taux de CD4.

L'un des premiers programmes pour améliorer les soins aux mères séropositives est l'initiative MTCT-Plus, lancée par l'Université de Colombia basée aux Etats-Unis il y a deux ans. (Le MTCT est l'acronyme pour "Transmission du VIH de la mère à l'enfant").

Ce projet, qui vise à améliorer le traitement et les soins dans les communautés pauvres, offre un certain nombre de services aux mères séropositives, à leurs partenaires et enfants, dont des conseils sur l'alimentation et l'adhésion aux ARV — ainsi que la fourniture réelle des ARV. Le programme aide également à former des agents de santé, à suivre et à évaluer les services de santé.

Le MTCT-Plus a été mis en œuvre sur 13 sites dans neuf pays en Afrique subsaharienne et en Asie, et a donné jusqu'ici l'accès au traitement ARV à 7.000 individus. En Afrique du Sud, trois sites ont été sélectionnés pour le programme : la 'Langa Clinic' dans la Province occidentale, le 'medical school' sur le campus de Durban de l'Université du KwaZulu-Natal, et l'Université de Witwatersrand à Johannesburg, dans la capitale économique d'Afrique du sud.

Anna Coutsoudis, un professeur associé au département de pédiatrie et de santé infantile à l'Université du KwaZulu-Natal, qui gère le programme MTCT-Plus de Durban, a souligné que des agents de santé bien formés et engagés sont "absolument vitaux" pour le succès de l'initiative. Toutefois, le manque d'agents de santé suffisamment qualifiés a réduit l'importance des conseils offerts aux femmes séropositives enceintes en Afrique du Sud — peut-être avec des conséquences fatales.

Une récente étude du 'South African Medical Research Council' (Conseil sud-africain pour la recherche médicale) financé par le gouvernement, le 'Health Systems Trust' (un groupe non gouvernemental) et l'Université du Cap occidental a montré que les conseillers manquaient de communiquer des informations cruciales sur la manière dont l'alimentation des bébés pouvait conduire à leur infection par le VIH.

Des recherches ont montré que le fait de mélanger l'allaitement au sein et l'alimentation au lait artificiel comporte un haut risque de transmission de VIH. Ceci peut être dû au fait que les enfants qui sont nourris avec un mélange de lait maternel et de lait artificiel risquent de développer une irritation dans leurs intestins, les rendant vulnérables pour contracter le virus.

On devrait conseiller aux femmes de choisir soit exclusivement l'allaitement au sein, avec un sevrage précoce à trois ou quatre mois, soit l'allaitement artificiel si elles ont accès à l'eau potable indispensable pour préparer le mélange en toute sécurité. Mais, seulement un tiers des femmes sondées dans l'étude, qui ont choisi d'utiliser l'allaitement artificiel, ont reçu des instructions à cet effet.

Une fois encore, il est devenu évident que ce qui arrive à une mère séropositive après son départ de la salle d'accouchement est tout à fait aussi important que ce qui se passe avant.