Appel aux migrants de retour à joindre leurs forces pour lutter contre la migration irrégulière

COTONOU, Bénin, le 21 mars 2019 (IPS) – Elhadj Mohamed Diallo veut s’assurer que les autres ne feront pas l’expérience de ce qu’il a vécu. L’ancien migrant en situation irrégulière qui est rentré chez lui en Guinée à sa sortie de prison en Afrique du Nord appelle ses camarades migrants de retour à créer des associations dans leurs pays respectifs, ce qui constituera un puissant moyen de lutter contre la migration irrégulière dans le continent.

« Si j’avais les ressources nécessaires, je ferais le tour de l’Afrique pour sensibiliser les gens sur la migration irrégulière. Mais parce que je ne les ai pas [ces ressources], j’exhorte tous les migrants africains de retour, où qu’ils soient, à prendre ce combat en main et à faire de leur mieux pour empêcher les gens qui veulent emprunter cette voie de vivre ce que nous avons enduré », il dit à IPS.

Ce pays d’Afrique de l’Ouest, riche en ressources naturelles, compte environ 13 millions d’habitants, dont 60% ont moins de 25 ans. Mais la corruption généralisée, la pauvreté, le faible score du pays sur l’Indice de développement humain (la Guinée occupe le 175e rang sur 189 pays), conjugués à des troubles politiques, ont vu des centaines de jeunes tenter une migration irrégulière dans l’espoir de retrouver la paix et la stabilité en Europe.

Le voyage est dur et les expériences de Diallo en termes de migration irrégulière sont traumatisantes. Au Maroc, il avait été agressé par cinq jeunes et grièvement blessé au visage et au dos. Cela ne l’avait cependant pas dissuadé d’essayer d’atteindre l’Europe par des moyens irréguliers. Et ce n’est qu’après sa troisième détention dans une prison libyenne qu’il a finalement regagné son pays par le biais de l’Initiative Conjointe Union Européenne (UE) – Organisation Internationale pour les Migrations (OIM) pour la Protection et la Réintégration des Migrants.

Le jeune homme âgé de 31 ans fait partie des migrants guinéens que l’OIM a aidés à rentrer chez eux. Au total, 12 609 migrants guinéens bloqués en Afrique du Nord ont été aidés par l’initiative UE-OIM à retourner chez eux du Niger, de la Libye, du Mali et du Maroc. Selon des chiffres récents de l’OIM, 4% des rapatriés en Guinée sont des femmes et 6% des mineurs.

Trente migrants de retour, dont Diallo, ont été sélectionnés comme volontaires dans le cadre de la campagne de l’OIM intitulée Migrants as Messengers (MaM) en Guinée, qui a débuté en juin 2018. MaM, qui opère au Sénégal, en Guinée et au Nigéria, est un «projet de sensibilisation [de pair à pair] à la migration irrégulière qui comprend diverses campagnes ciblant, entre autres, les parents, les migrants de retour et les candidats à la migration irrégulière».

« Elles sont réalisées par de jeunes migrants qui sont rentrés de différents pays d’Afrique du Nord avec le soutien de l’OIM et de ses partenaires », explique Mariama Bobo Sy, porte-parole de l’OIM en Guinée, à propos du projet.

Dans le cadre de la campagne de sensibilisation, les migrants de retour en Guinée ont participé à des manifestations organisées dans le cadre de matchs de football, de spectacles musicaux et même d’universités.

« Ils ont également organisé des groupes de discussion avec des jeunes de différents quartiers de Conakry et à l’extérieur de la capitale, en particulier de Mamou, une ville carrefour située à 275 km de Conakry. En outre, ils étaient de temps en temps en contact avec les médias pour discuter de la question de la migration irrégulière dans le but de toucher davantage de personnes et de faire passer le message à différentes couches de la population », a déclaré Sy.

L’expérience a permis à Diallo de se rendre compte qu’il était nécessaire de prendre des mesures supplémentaires. Il a ensuite fondé l’Organisation Guinéenne pour la Lutte contre la Migration Irrégulière (OGLIM).

Outre son siège dans la capitale Conakry, OGLIM compte cinq antennes nationales, notamment à Kindia, Mamou, Labé, Kankan et Nzerekore. Le groupe compte actuellement 550 membres à Conakry et 250 en dehors de la capitale.

«Les choses terribles que nous avons vues et vécues lors de notre épreuve en Afrique du Nord devraient servir de catalyseur pour informer les jeunes générations des dangers de la migration irrégulière», explique Diallo.

«Cependant, nous devons le faire de manière unie afin que le message transmis par des efforts concertés et en tant que bloc atteigne efficacement les communautés et ait un impact durable sur notre société.»