GAZA: La guerre est finie mais pas la crise du logement

GAZA CITY, 9 sep (IPS) – “Lorsque les bombardements [israéliens] ont commencé, j'ai rassemblé ma famille et [nous nous sommes] dirigés vers ce que je croyais était un endroit sûr, comme une école, mais celle-ci est devenue ensuite surpeuplée et manquait d'assainissement, nous avons donc fini par nous retrouver sur le terrain de l'hôpital”.

Islam Abu Sheira, originaire de Beit Hanoun, une ville à l’extrémité nord-est de la bande de Gaza, parlait à IPS devant ce qui est la 'maison' de fortune de sa famille à l’Hôpital Al-Shifa à Gaza depuis les deux derniers mois. Des larmes coulaient de ses yeux lorsqu’il se souvenait de sa maison dévastée et de ses efforts pour trouver un refuge sûr pour sa famille.

Dans sa quarantaine, Islam a décrit le calvaire de sa famille après que les bombardements israéliens les ont laissés sans abri et ils ont d'abord trouvé refuge dans une école gérée par l’Agence des Nations Unies pour l’aide aux réfugiés palestiniens (UNRWA), et ont été ensuite forcés par le surpeuplement et les mauvaises conditions sanitaires de partir trouver refuge ailleurs.

“Je n'ai trouvé aucun autre endroit sûr pour [nous] refugier que l'Hôpital Al-Shifa. Ensemble avec nos sept enfants, nous avons fui sur le terrain de l'hôpital et avons passé la première nuit à dormir sous les arbres pour échapper aux missiles israéliens qui détruisaient des zones entières, tuant des familles entières”, a déclaré Islam, ajoutant que “pendant la guerre, la seule chose que nous cherchions était un endroit qui pourrait nous protéger contre les bombardements”.

Comme la plupart des familles palestiniennes dont les maisons ont été détruites, ils ont perdu leurs biens et, pour le moment, leurs chances de vivre une vie de dignité. La plupart des familles dans la bande de Gaza étaient obligées de quitter leurs maisons si rapidement qu'elles n'avaient pas le temps de prendre quoi que ce soit avec elles.

“Nous n'avons tout simplement pas de moyens de subsistance et mes enfants dorment chaque nuit par terre sans même une couverture”, a déploré Islam. “Nous menons une vie primitive depuis que nous avons fui notre maison sans même prendre les vêtements dont nous avons besoin”.

Au fur et mesure que le nombre de personnes fuyant les bombardements augmentait, la difficulté de les loger s’intensifiait également. Les écoles ont fait de leur mieux, mais il y avait l’insuffisance des nécessités de base et des fournitures médicales, et elles logeaient quatre ou cinq personnes, sinon plus, dans chaque salle de classe.

Jamila Saad, une ménagère qui prend soin de sa famille de 12 membres et a aussi fui vers l'une des écoles de l'UNRWA, a dit à IPS: “L'école recevait de plus en plus de réfugiés, et les autres familles de réfugiés et nous partagions une seule toilette. Nous avons besoin d'une vie meilleure pour nos enfants et nous espérons que notre maison sera bientôt reconstruite afin que nous puissions commencer une nouvelle vie là-bas dans notre nouvelle maison”.

Les conditions complexes et difficiles dans lesquelles se trouvent les réfugiés palestiniens dans les écoles et autres centres d'accueil ont poussé la plupart des organisations internationales à fournir aux réfugiés autant d'aide que possible, mais cela est loin de comment trouver une solution définitive à la souffrance des réfugiés.

Les conditions des milliers de réfugiés qui ont perdu leurs maisons ont placé le nouveau gouvernement palestinien devant un énorme défi et une grande responsabilité de fournir à ces familles de réfugiés des soins et un environnement sécurisé, ainsi que d’assumer la responsabilité de mettre en œuvre des programmes de reconstruction financièrement soutenus par l'Union européenne et les pays donateurs conformément à l'accord de cessez-le-feu signé au Caire entre Israël et le Hamas, en particulier en termes de la reconstruction de Gaza.

Moufid al-Hasayna, ministre des Travaux publics et du Logement dans le nouveau gouvernement d’union nationale de la Palestine, a déclaré à IPS que “l’ampleur de la destruction des maisons et des installations économiques est énorme, et la population de Gaza vit dans des conditions difficiles; nous travaillons donc dur pour améliorer les conditions de vie des gens. Nous travaillons sur des programmes visant à commencer la reconstruction de la bande de Gaza et à reconstruire les maisons détruites”.

Al-Hasayna estime que la vision floue que les Palestiniens dans la bande de Gaza ont de leur avenir après 50 jours de guerre et leur peur constante d'être ciblés de nouveau par les forces d'occupation israéliennes en ont seulement rajouté à l’aggravation de leur situation.

Amjad Shawa, directeur du Réseau palestinien des ONG, a indiqué à IPS: “Les circonstances difficiles que la bande de Gaza a connues au cours des 50 jours de la guerre d'occupation israélienne ont réduit l'accès de la population à l'eau et à la nourriture et ont menacé la sécurité des personnes, tandis que le bombardement de hautes 'tours' résidentielles abritant des dizaines de familles a laissé de graves impacts sur les civils.

Selon Shawa, la situation du logement est maintenant d'autant plus dramatique parce que, avant même l’opération 'Bordure protectrice' d'Israël, la bande de Gaza souffrait déjà de déficit de 70.000 logements qui avaient été détruits pendant les guerres de 2009 et de 2012.

“A la suite des deux guerres, des projets de logement prévus pour reconstruire les infrastructures n'ont pas été mis en œuvre, et le déficit de logements a atteint un point qui a mis la population dans une situation de véritable catastrophe”, a déclaré Shawa à IPS.

Il a demandé à l'Autorité palestinienne de créer un organe indépendant des organisations de la société civile palestinienne afin de développer un plan de reconstruction de la bande de Gaza.

Selon un rapport préparé par le Bureau central palestinien des statistiques (PCBS) en juin 2014, la bande de Gaza abritait une population estimée à 1,76 million d’habitants vivant dans une zone côtière qui s'étend le long de la mer Méditerranée et couvre environ 365 kilomètres carrés avec une largeur maximale de 12 kilomètres.

Le PCBS croit que la surface étroite et la forte population de la bande de Gaza ont contribué dans une certaine mesure à la répartition de la population dans les grands blocs et ont augmenté la densité de sa population, transformant la bande en une des zones les plus densément peuplées au monde.

La densité de population dans la bande de Gaza a atteint 2.744 habitants par kilomètre carré, et les experts disent que cela signifie que les vivres, la santé et l'éducation devraient être les principales priorités pour le futur programme de développement élaboré par les décideurs.

Edité par Phil Harris Traduit en français par Roland Kocouvi