ILE MAURICE: Des fermiers accros du commerce équitable

PORT LOUIS, 27 juin (IPS) – En quête d’un moyen de supporter une réduction de 36 pour cent des prix du sucre, les fermiers mauriciens exportent non seulement une variété de fruits et légumes vers l'Union européenne (UE), mais ils ont commencé aussi l'agriculture d’une manière plus durable au plan environnemental.

C'est parce qu'un grand nombre d'agriculteurs de l’île Maurice, sur l'océan Indien, sont devenus certifiés pour le commerce équitable. Le commerce équitable est un mouvement social qui promeut seulement des termes pour des fermiers et des travailleurs et encourage la durabilité dans le monde en développement. Les produits certifiés pour le commerce équitable imposent aussi généralement un prix plus élevé que ceux qui sont ordinaires en raison des normes élevées et de l'éthique que leur production implique.

L'île Maurice est l'un des plus grands exportateurs de sucre d'Afrique vers l'Europe, et une grande partie de son sucre raffiné est exporté vers l'UE. Mais lorsque le prix du sucre a chuté sur une période de trois ans d’un total de 36 pour cent à la fin de 2010, les petits agriculteurs dans le pays ont remarqué qu'ils pouvaient encore gagner de bons revenus et le faire d'une manière qui protégerait l'environnement de cette petite île des engrais et produits chimiques nocifs.

“Nos revenus étaient en baisse. Alors, c’était mieux d’être certifiés pour le commerce équitable afin de gagner un peu plus d'argent”, a déclaré Keshoe Parsad Chattoo, un fermier.

Les produits étiquetés commerce équitable se vendent généralement bien en Europe et aux Etats-Unis parce qu'ils répondent aux normes internationales convenues pour l'environnement, la main-d’œuvre et le développement. Il y a environ 3.000 produits qui tombent sous cette étiquette, y compris le sucre, le café, les épices, la vanille et les bananes. Les consommateurs paient volontiers plus pour des produits issus du commerce équitable, une prime de 585 dollars la tonne dans le cas du sucre, au-dessus du prix normal d'environ 525 dollars la tonne.

Jean-Philippe Zanavelo, représentant de l'organisation 'Fair Trade International' pour l'île Maurice, a indiqué que les producteurs sont au cœur du concept de commerce équitable.

“Les consommateurs sont prêts à payer plus pour les produits de bonne qualité, et cet argent supplémentaire va directement aux producteurs. Ils obtiennent de bons marchés et atteignent le développement durable”, a-t-il dit à IPS.

En conséquence, plusieurs fermiers locaux se joignent au mouvement dans le pays.

“Nous produisons et exportons actuellement des aliments de bonne qualité exempts de produits chimiques qui troublent notre santé et notre environnement, et gagnons un revenu supplémentaire”, a déclaré Kishan Fangooa, un agriculteur et secrétaire de la 'Long Mountain Pineapple and Allied Growers Cooperative Society Ltd' (Société coopérative des producteurs d’ananas et produits alliés de Long Mountain, SARL). Cette société a près de cinq hectares d'ananas à Long Mountain, dans le nord de l'île Maurice.

Le mouvement pour le commerce équitable a commencé ici en 2011, avec 4.500 agriculteurs de 32 sociétés coopératives. Cette année-là, ils ont gagné 701.000 dollars en recettes, par rapport à 492.000 dollars en 2010, lorsque moins de fermiers étaient membres.

Devenir certifié pour le commerce équitable est un processus astreignant et difficile, ont indiqué certains agriculteurs à IPS. Mais beaucoup estiment que cela vaut la peine.

“Les critères peuvent être contraignants, mais ils permettent d’améliorer la qualité de nos produits et nous sommes déterminés à gagner un revenu accru”, a expliqué Fangooa à IPS.

Les producteurs doivent être contrôlés par l'organisme de normalisation, 'Fair Trade International', et un organisme de certification indépendant pour s'assurer que les normes convenues sont réunies. En adhérant au commerce équitable, les producteurs doivent se conformer aux critères comprenant la démocratie, la transparence, la bonne gouvernance et la protection de l'environnement.

Narain Phagoo, un agriculteur certifié pour le commerce équitable, a affirmé que les produits sont régulièrement contrôlés.

“En dehors des examens et inspections réguliers des champs, je comprends qu'il y ait des laboratoires en Europe qui continuent de contrôler la qualité de nos produits que nous exportons. Ils sauront si nous utilisons des produits prohibés et ils rejetteront nos exportations”, a-t-il déclaré à IPS.

“Nous ferions mieux de respecter les règlements et obtenir notre revenu accru”, a-t-il ajouté.

Rajen Hemoo, secrétaire de la Société coopérative de Victoria, a indiqué que le concept de commerce équitable était bon pour les petits producteurs et que les exigences n’étaient pas difficiles à respecter.

“C'est un nouveau modèle d’action, une manière disciplinée de production. C'est un vieux concept, mais nous l'avons découvert seulement récemment”, a-t-il dit.

“Il y a à la fois des avantages directs et indirects à ce concept. Nos intrants sont subventionnés, nous obtenons des subventions en espèces et des prêts à faibles taux d'intérêt. Nous nous impliquons également dans la communauté dans notre région”, a-t-il indiqué depuis son champ de canne à sucre à Congomah, dans le nord de l’île Maurice.

Les agriculteurs sont tenus de partager une partie de leurs recettes avec leurs communautés locales en finançant des activités sociales ou en aidant au développement des villages. Cependant, il n’y a aucun montant prescrit par rapport à combien ils doivent donner.

Mais ce n’est pas tout le monde qui est enthousiaste à être certifié pour le commerce équitable dans le pays. Dans le sud de l'île, les membres de l'Association des planteurs du sud (SPA) hésitent à rejoindre le mouvement.

“Nous produisons des cannes et le sucre. Mais, les communautés reçoivent l'argent supplémentaire et le gèrent pour elles-mêmes. Nous pensions que l'argent supplémentaire obtenu du commerce équitable irait dans les poches des petits producteurs directement pour les aider à gérer la hausse des coûts de production”, a déclaré Gassen Modely, président de la SPA, au sujet de l'obligation pour les producteurs de remettre une partie de leurs bénéfices à la communauté.