DEVELOPPEMENT-AFRIQUE: Les gouvernements doivent atteindre les femmes rurales

KIGALI, 11 août (IPS) – Les gouvernements, particulièrement en Afrique, doivent mettre en place d’importantes mesures de reddition de comptes afin d'atteindre efficacement les femmes dans les zones rurales par une budgétisation sensible au genre.

Telle était l'une des recommandations de l'Appel mondial pour le plan d'action élaboré à la fin d'une rencontre internationale de haut niveau sur une budgétisation sensible au genre, tenue à Kigali, la capitale rwandaise, du 26 au 28 juillet. Cette réunion a été organisée conjointement avec l'Entité des Nations Unies pour l'égalité des sexes et l'autonomisation des femmes (ONU-Femmes) et l'Union européenne.

Les délégués ont également convenu qu'il fallait renforcer les compétences et aptitudes des dirigeants des gouvernements locaux. En outre, l'amélioration des systèmes statistiques nationaux était nécessaire pour fournir des données précises sur les différents aspects relatifs au genre.

Ce document, qui n’est pas encore publié, indiquait également que les moyens de subsistance des femmes marginalisées, dans les zones rurales, doivent être améliorés en augmentant leur accès à la propriété foncière et aux droits de propriété.

Le Rwanda a été qualifié de modèle pour d’autres pays africains en matière de promotion de l'égalité des sexes à tous les niveaux de prise de décision, puisqu’ici, les femmes sont majoritaires au parlement. La constitution du pays garantit également un minimum de 30 pour cent de représentation féminine à tous les niveaux de direction.

Le Rwanda est impliqué dans un programme pilote de trois ans, le 'Gender Equitable Local Development' (Développement local équitable entre les sexes – GELD), destiné à améliorer l'accès des femmes aux ressources et aux services au niveau local grâce à une planification et une budgétisation sensibles au genre. Le GELD est organisé par l’ONU-Femmes et le Fonds d’équipement des Nations Unies.

“Le Rwanda enregistre des postes à prédominance féminine à divers niveaux de prise de décision, mais les femmes ont également besoin de s'engager dans d'autres carrières économiques telles que les industries du bâtiment et des transports”, a déclaré Suzanne Ruboneka, une activiste des droits des femmes basée à Kigali.

Les femmes représentent 54 pour cent de la population rwandaise estimée à neuf millions d’habitants. Bien qu'il n'existe pas de statistiques disponibles sur le nombre d'entreprises appartenant aux femmes, le gouvernement reconnaît que la majorité des employés dans les secteurs formel et informel sont des femmes.

La directrice régionale de l'ONU-Femmes, Diana Ofwona, a dit qu'il était important de promouvoir davantage l'égalité des sexes à travers l’appropriation, par les femmes, des initiatives de développement telles que les programmes de microfinance. Elle a affirmé que c'était une façon de rendre la coordination plus efficace en matière de budgétisation sensible au genre.

Fatuma Mukakarara, la présidente d’une coopérative de femmes musulmanes à Nyagatare, dans le nord-est du Rwanda, a déclaré que l'implication des femmes dans les services financiers assure une plus grande transparence.

“Nous faisons partie de l'équipe de gestion dans ces coopératives de services financiers (et) cela contribue à garantir une transparence et une reddition de comptes plus grandes”, a-t-elle confié à IPS.

Elle a indiqué que grâce à son expérience dans la gestion d'une entreprise de microfinance, elle sait que les femmes rurales peuvent jouer un rôle capital dans la gestion des ressources financières.

“Mais parfois, les femmes rencontrent des difficultés pendant qu’elles demandent un prêt auprès (d’une institution) de microfinance. Cela peut être dû à un manque d'estime de soi pour beaucoup”, a affirmé Mukakarara.

Ofwona a estimé que ce qu’il fallait surtout, c’était une planification adéquate pour intégrer l'équité dans la gestion et le partage des ressources.

“Cela comprend la suppression de certains obstacles qui empêchent parfois les femmes d’accéder de façon équitable aux services locaux (tels que les transports et les programmes de microfinance), en particulier dans les zones rurales”, souligne Ofwona.

Des analystes économiques disent que la collecte de données statistiques sur les questions liées au genre est toujours un défi majeur pour certains pays.

“Une fois qu'il existe des données disponibles sur le genre, cela permettrait aux pays de déterminer les progrès réalisés dans le sens de la réalisation de leurs objectifs (concernant la budgétisation sensible au genre)”, a déclaré Bernard Kayinamura, un expert en économie basé à Kigali.

Kayinamura a indiqué que, par exemple, les données désagrégées sur les élèves du secondaire qui étudient les matières scientifiques ne pouvaient pas expliquer pourquoi le nombre de filles qui font ces matières n'augmentait pas.

“Ainsi, il y a parfois des chiffres qui manquent, qui devraient être utilisés (par les décideurs) pour revoir les politiques, les procédures, les pratiques et les objectifs”, a-t-il expliqué à IPS.

Depuis 2009, le gouvernement et les organisations de la société civile du Rwanda se sont lancés dans une campagne nationale destinée à former des femmes rurales dans l'administration et la gestion des programmes de microfinance. Cependant, il n'existe pas de chiffres disponibles concernant le nombre de femmes qui ont suivi la formation.