MOYEN-ORIENT: Un sommet de l’eau pour résoudre les pénuries

NATIONS UNIES, 16 jan (IPS) – Au milieu d'une crise croissante de l'eau au Moyen-Orient et en Afrique du nord (MENA) très aride, certains des experts mondiaux de l'eau les plus influents se réunissent du 15 au 17 janvier au Sommet international de l'eau (IWS) à Abu Dhabi, aux Emirats Arabes Unis (EAU) pour rechercher des solutions durables.

La Banque mondiale a déjà prévenu que le MENA est au monde “la région la plus pauvre en eau, (qui) abrite 6,3 pour cent de la population mondiale mais avec seulement 1,4 pour cent d'eau douce renouvelable”.

Les six pays qui composent le Conseil de coopération du Golfe (CCG) – Bahreïn, Koweït, Oman, Qatar, Arabie Saoudite et EAU – devraient dépenser la somme astronomique de 725 milliards de dollars au cours des deux prochaines décennies sur de nouveaux projets d'eau, des usines de dessalement, la construction des infrastructures et des innovations de haute technologie.

Prié d'évaluer les problèmes de l'eau dans la région, Dr Anders Jagerskog, maître de conférences et directeur des services de connaissances à l’Institut international de l’eau de Stockholm (SIWI), a déclaré à IPS: “La crise de l'eau dans la région du MENA est grave”.

La région, a-t-il souligné, manquait d'eau douce pour parvenir à l'autosuffisance alimentaire – disposait essentiellement de l'eau nécessaire pour l'irrigation – déjà dans les années 1970.

“Mais depuis ce temps, la région se débrouille grâce à l'importation accrue de 'l'eau virtuelle', a-t-il noté, ce qui signifie “de l'eau incrustée ou utilisée pour produire les aliments importés dans la région, par exemple”.

Le problème est peut-être pire en Palestine, où il existe à la fois une disponibilité très limitée ainsi que le conflit qui affecte gravement les possibilités pour les Palestiniens de développer une gestion de l'eau qui fonctionne bien puisqu’ils ne contrôlent pas les ressources en eau, a-t-il ajouté.

Outre les pays comme la Jordanie et le Yémen, la demande en eau douce renouvelable a également continué à augmenter dans les six pays du CCG, selon les experts de l'eau.

Au sommet d'Abu Dhabi, le projet 'Project Stream' offrira une grande opportunité pour les promoteurs et les investisseurs de “s’associer et d'accélérer la construction de solutions durables de l'eau”.

Ce sommet, qui fait partie de la Semaine du développement durable à Abu Dhabi, abritée par Masdar – décrite comme “une ville d’énergie verte durable de l'avenir” -, rassemble également des financiers et certains des principaux fournisseurs de l'ingénierie, des technologies et de services au monde.

Peter McConnell, directeur de la foire de l’IWS, affirme que les pays du CCG ont massivement investi dans la durabilité de l'eau au cours de ces dernières années.

“Et le 'Project Stream' deviendra essentiellement une plateforme de réseautage qui reliera des fournisseurs de solutions à travers le monde aux promoteurs de projets venus de la région”, a-t-il ajouté.

Ces projets, a indiqué McConnell, vont des entreprises de construction d'infrastructures gouvernementales de plusieurs milliards de dollars aux innovations de haute technologie dans des domaines tels que le dessalement à faible consommation d'énergie, la prévention des fuites d'eau et l'efficacité de l'eau.

“Ceux-ci (ces projets) contribueront de manière significative à répondre aux défis mondiaux entourant l'approvisionnement en eau claire”, a-t-il ajouté.

Prié de dire si le dessalement était une réponse, Dr Jagerskog de SIWI a déclaré à IPS qu'une partie de la solution réside dans l’accroissement du dessalement, mais que l'eau dessalée est seulement une solution économiquement viable pour les usages industriels et domestiques alors qu'elle n'est pas économiquement efficace pour l'irrigation.

Bien que le coût varie – et diminue quelque peu – le prix de 1.000 litres d'eau à dessaler se situe entre 0,8 et un dollar.

Alors qu'un kilo de céréale nécessite environ 1.000 litres d'eau, il est évident que le coût de l'eau pour produire un kilo de céréale est proche d’un dollar.

“Alors, l'avenir réside dans une combinaison de choses – le dessalement de l'eau à des fins cosmétiques et industrielles, l'augmentation de l'efficacité de l'utilisation de l'eau, l'accroissement de la réutilisation des eaux usées traitées pour l'irrigation, ainsi que la dépendance continue de 'l'eau virtuelle' importée”, a expliqué Dr Jagerskog.

Le groupe industriel de réflexion, 'Global Water Intelligence' (GWI), qui collabore avec 'Project Stream' à Abu Dhabi, a annoncé de gros investissements prévus par les pays du Golfe, équivalant à 725 milliards de dollars, au cours des deux prochaines décennies.

Entre 2013 et 2017, le Qatar envisage d'investir quelque 1,1 milliard de dollars dans la capacité de dessalement à travers des projets indépendants d'eau et d'énergie (IWPP).

Le Koweït a un budget municipal combiné pour des investissements sur l'eau/les eaux usées de 4,4 milliards de dollars de 2013 à 2016, alors que le budget des EAU atteint 13 milliards de dollars.

L’Arabie Saoudite devrait dépenser environ 53,9 milliards de dollars au cours des deux prochaines décennies pour construire, exploiter et entretenir des projets d'eau afin de répondre à la demande croissante dans le royaume, selon les estimations de GWI.

En attendant, le secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon, a prévenu que les pénuries d'eau causent des problèmes sociaux et entravent le développement.

“Elles créent des tensions dans les régions sujettes à des conflits. Trop souvent, lorsque nous avons besoin d'eau, nous trouvons des armes. Il existe encore assez d'eau pour nous tous – mais seulement pourvu que nous la maintenions propre, l'utilisions plus sagement, et la partagions équitablement”, dit-il.

Et selon les Nations Unies, quelque 700 millions de personnes, dans 43 pays, souffrent de pénurie d'eau.