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RD CONGO: Les expulsés de l’Angola dans le désarroi

KIKWIT, RD Congo, 30 mai (IPS) – Expulsés de l’Angola pour séjour irrégulier, environ 42.000 Congolais ont regagné en mai la République démocratique du Congo (RDC), indique Laurent De Boeck, chef de mission de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) en RDC.

Selon l’OIM, «ce processus de retour s’inscrit dans la volonté de l’Angola et de la RDC» qui étaient d'accord sur le principe de ces expulsions.

Fatiguée, maigre, malade et sans ressources, Miriam Abubakar, 26 ans, est allongée sur un lit de la polyclinique 'Sciences et vie' de Kikwit, la principale ville de la province du Bandundu frontalière avec l’Angola, dans le sud-ouest de la RDC, où quelque 6.000 expulsés sont arrivés.

Abubakar figure parmi les 250 Congolais arrivés à Kikwit le 17 mai. «Nous avons connu un calvaire car de la cité de Kafumvu en Angola jusqu’à Kahemba (au Bandundu), nous avons marché pendant une semaine. Parfois sous la pluie dans un espace où il n’y a pas de maison», affirme-t-elle, triste.

Elle déclare que beaucoup d’autres Congolais sont morts en cours de route soit par accident soit de maladie faute de traitement. «Pour manger, il fallait mendier auprès des familles de bonne volonté».

De son côté, Désiré Mungolo, 25 ans, a des jambes enflées pour avoir marché pendant 10 jours. «Avant notre départ de Tundu au nord de l’Angola, des policiers passaient avec des mégaphones pour lancer des messages obligeant les Congolais à quitter ce pays», raconte-t-il à IPS.

Pour Mungolo, les deux ans passés là-bas étaient parmi les cinq qu’il avait prévus pour obtenir des ressources avant de rentrer au pays. «Comment vais-je mener cette nouvelle vie?», s’interroge-t-il.

La Coordination de la société civile (CSC) du territoire de Kasongo-Lunda, dans le sud-ouest du Bandundu, affirme que plus de 5.000 Congolais dont 103 femmes et quatre filles violées, sont arrivés à Tembo, Kawungula et Mawangu les 8 et 16 mai dans une «situation sociale déplorable».

La CSC ajoute que ces expulsés sont momentanément pris en charge par la Fondation Femme Plus, une ONG à caractère social basée à Tembo. Mais elle est débordée. «Il faut près de 1.000 dollars tous les deux jours pour les aider dans la mesure du possible et des pirogues motorisées pour assurer la traversée de nouveaux arrivants sur la rivière Tungila», indique-t-elle.

Dans la province du Katanga (sud-est de la RDC), des journalistes joints par IPS indiquent que les Congolais expulsés arrivent nombreux par des postes frontaliers de Musevumay et de Kasamay, dans le territoire de Kapanga, dépouillés de leurs biens.

Ils ajoutent que l’administration du territoire a contacté certaines églises pour les héberger. «Mais cette assistance a une durée éphémère».

Dans les provinces du Kasaï occidental et du Kasaï oriental (centre du pays), ces expulsés reviennent dans les mêmes conditions. Certaines organisations locales ou étrangères leur apportent petit à petit une assistance.

Selon De Boeck, de l’OIM, «La situation de désarroi va vite trouver une solution parce qu’il y a une équipe mixte inter-agences qui travaille déjà pour évaluer les besoins en nutrition, soins médicaux et logements».

L’ultimatum des autorités angolaises avait expiré le 15 mai dernier. Après cette date, le gouvernement devrait procéder à un retour forcé, indique le Bureau de coordination des affaires humanitaires (OCHA).

«Malgré cela, ces expulsés ont droit à une vie décente, aux soins de santé et à la nourriture, mais 80 pour cent croupissent dans des conditions inhumaines. Beaucoup de familles ont perdu les leurs suite à cette gymnastique devenue comme une habitude de la part de l’Angola», regrette Sylvain Kufonde, un activiste des droits de l’Homme en RDC.

«En 2012, plus de 60.000 Congolais avaient été expulsés dans des conditions déplorables», rappelle l’OCHA dans sa note d’information du 8 mai.

Franck Bavu, un blogueur congolais, indique sur son site qu’en juillet 2009, près de 7.000 Congolais avaient franchi la frontière angolaise pour retourner au pays.

Ivan Simonovic, secrétaire général adjoint des Nations Unies pour les droits de l’Homme, en séjour en RDC, avait condamné, le 10 mai, «la violence avec laquelle sont menées ces opérations d’expulsion».

Jean-Christophe Malela, chargé de communication au gouvernorat de la province du Bandundu, a affirmé à IPS que depuis quelques jours, une délégation composée des ministres et députés provinciaux était déjà en Angola pour discuter sur la manière de mener ces opérations et sur la possibilité de rouvrir la frontière dans un futur proche.

«Le gouvernement est en train d’organiser, avec la direction générale de migration, le ministère de l’Intérieur et des Affaires sociales ainsi que les partenaires, l’accueil des compatriotes. Mai vu leur nombre, les structures mises en place sont dépassées», a déclaré Lambert Mende, le porte-parole du gouvernement congolais.

Badylon Kawanda Bakiman

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