COMMERCE: Les débuts de l’Afrique du Sud au sommet du BRICS

LE CAP, 21 avr (IPS) – L’Afrique du Sud avait mené un lobby énergique pour être invitée à adhérer au BRICS qu’elle perçoit comme un club d’élites des marchés émergents, et les autorités doutaient d’une entrée assurée parmi des pairs beaucoup plus forts dans le groupe.

Le pays a participé, pour la première fois, à une rencontre des principales économies émergentes, notamment à un sommet du BRICS, le 14 avril, sur l’île de Hainan, en Chine. Ce sommet a consacré l'avènement du BRICS avec l'arrivée de l'Afrique du Sud qui s'ajoute au BRIC. L’idée de ce qui était initialement appelé BRIC – l'acronyme désignant le Brésil, la Russie, l’Inde, et la Chine – est née d’un document de concept de Jim O'Neill, un économiste de Goldman Sachs, en 2003, identifiant les pays ayant des économies qui croissent plus rapidement, des classes moyennes en pleine expansion et des marchés intérieurs prometteurs, leur donnant le potentiel de dépasser le G7 comme étant les économies les plus performantes au monde d’ici à 2040. Le concept a émergé de lui-même, devenant un véritable forum de consultation et de coordination entre les quatre premiers membres. L’analyse d’O'Neill n’avait pas classé l’Afrique du Sud comme un membre même de second rang des économies émergentes, mais le gouvernement du pays s’est battu pour avoir une place à la table. Le ministère sud-africain des Relations internationales et de la Coopération affirme que cette adhésion améliorera le statut du pays en tant qu’économie locomotive en Afrique. Selon un communiqué publié par le ministère, le président Jacob Zuma devrait profiter du sommet “pour exprimer clairement l’importance stratégique du pays, de même que pour assurer la synergie du programme du mécanisme du BRICS avec les priorités économiques et de développement de l’Afrique, telles que le développement des infrastructures, la valorisation des minéraux et la création de la valeur ajoutée”. Les avis sur la façon dont l’Afrique du Sud – et par extension l’Afrique – bénéficiera de l’adhésion au BRICS sont divergents. Forum toujours en évolution “Le BRIC a démarré comme étant un bloc économique compensateur et aujourd’hui les gens disent qu’il développera des stratégies politiques et économiques clé”, déclare Chris Landsberg, professeur de relations internationales à l’Université de Johannesburg. Mais, dit-il, il est encore trop tôt d’évaluer ce que seront les avantages tangibles de cette adhésion pour l’Afrique du Sud. “Nous sommes le nouveau meneur dans le club et nous devons faire attention pour ne pas nous réjouir trop vite”, souligne Lebohang Pheko, directrice de la politique et du plaidoyer de 'Trade Collective', une organisation basée à Johannesburg. “Mon opinion est mitigée. Je ne suis par sûre de la manière dont l’Afrique du Sud ou l’Afrique bénéficierait de son entrée dans le BRIC”. Elle estime que le pays a eu une “approche très insulaire et impériale en Afrique” et qu’elle n’est pas sûre que la relation avec le BRICS change cela. “Dans le domaine du commerce et de l’investissement”, rétorque Biswajit Dhar, directeur de 'Research and Information System for Developing Countries' (Système de recherche et d’information pour les pays en développement), un institut basé à Dheli, en Inde, “le BRICS apportes d’importantes contributions en renforçant les liens avec les pays à faible revenu”. Il indique que les investissements des membres du BRICS ont été largement à la base de la croissance constante que des pays à faible revenu sur le continent ont connue ces dernières années, puisque la Chine, en particulier, a étendu progressivement ses relations commerciales avec l’Afrique au-delà d’une attention initiale sur l’extraction des matières premières, qui a souvent un avantage de développement limité pour les pays exportateurs. “Une proportion assez importante des investissements a été d’abord réalisée dans les industries de ressources naturelles, mais avec le temps, l’argent est aujourd’hui injecté non seulement dans l’agriculture et l’industrie de fabrication, mais également dans un certain nombre de secteurs de services, notamment dans les télécommunications”, observe Dhar. Mais Pheko déclare qu’elle ne voit aucun avantage pour les pauvres ou les personnes vulnérables au sein des partenaires commerciaux à faible revenu parmi les membres du BRICS, ou même en Afrique du Sud elle-même. Elle souligne l’impact des échanges commerciaux avec la Chine sur l’industrie textile du pays pour illustrer son point de vue. “Observez notre interaction avec le marché chinois. Ils ont réussi à pénétrer et à déverser leurs tissus et leurs marchandises bon marché et de qualité inférieure non seulement en Afrique du Sud, mais aussi dans le reste de l’Afrique”. Des changements pour le meilleur Le transfert des technologies dans les domaines de l’agriculture et de la fabrication pourrait profiter à l’Afrique du Sud, puisque le pays essaie de s’engager dans la voie d’une croissance soutenue dans l’emploi.

Le ministère du Commerce et de l’Industrie (DTI) indique qu’il recherchera des investissements étrangers directs dans les industries à valeur ajoutée. Le DTI considère la collaboration en matière de recherches comme un domaine clé qui pourrait être renforcé par l’adhésion au BRICS. Biswaijit Dhar affirme: “Une caractéristique de leur implication a été que des firmes [des pays] du BRICS collaborent avec les petites et moyennes entreprises dans les pays les moins avancés, et ils ont aussi fourni des technologies”. Avant le sommet, les médias annonçaient quelques accords commerciaux conclus au cours des rencontres bilatérales, tels que l’achat par la Chine d’un aéronef brésilien qui s’élèverait à 1,5 milliard de dollars. Au moment où il partait pour la Chine, le Premier ministre indien, Manmohan Singh, avait déclaré aux medias indiens qu’il s’attendait à des discussions sur la manière dont les pays du BRICS peuvent aider à soutenir la relance de l’économie mondiale, et à un échange d’opinions et de positions sur la gestion de la volatilité des devises et de l’inflation. “Si nous pouvons coordonner nos positions sur certains domaines clé, tels que le développement durable, la croissance équilibrée, l’énergie et la sécurité alimentaire, la réforme des institutions financières internationales et des échanges commerciaux équilibrés, ce sera à notre avantage”, a confié Singh aux journalistes. Un accord, qui devrait été signé à la rencontre des chefs d’Etat le 14 avril – afin de permettre aux membres du BRICS d’étendre, les uns vers les autres, les subventions ou les crédits dans leur propre monnaie plutôt qu’en dollar américain – avait été également annoncé dans la presse indienne.